La route australe chilienne, une partie de la panaméricaine

La Route Australe au Chili est parallèle à la Route 40 en Argentine et la continuation de la Panaméricaine qui relie l’Alaska à la Terre de Feu. Cette route est très récente. La première portion fut inaugurée en 1986 à la demande du général Pinochet, alors à la tête du Chili, qui prit la décision de construire une route reliant les nombreux villages et villes dans le sud du Chili.

À l’époque, ces villages étaient totalement isolés du reste du pays : certains villages ne possédaient qu’un accès par la mer à partir du territoire, à moins de fouler obligatoirement par voie terrestre le sol argentin. Un grand nombre de villages semblent s’être arrêtés dans le temps.

L’étroit territoire du sud chilien de Puerto Montt, entre les Andes et la mer, est découpé par des fjords profonds formés durant le dernier âge de glace. Le terrain est très abrupt, tapissé de volcans, de coulées de lave, de lacs, de rivières et de l’épaisse forêt andine de Patagonie. Dans cette région, il est possible de visiter la réserve naturelle de Pumalín, et le parc national Hornopirén.

Le Parc Pumalín est le plus grand parc privé du monde, avec 320.000 hectares transformés en réserve naturelle. L’entrée principale du parc doit être réaménagée après le passage destructeur des nuages de cendres du volcan Chaiten.

Sur le chemin, on suit le cours de la rivière Futaleufú, mondialement réputée pour la pratique du kayak et du rafting. Des centres thermaux, dont le plus connu Puyuhuapi, ponctuent la route. C’est également le paradis de la pêche sportive et une zone intense d’élevage de saumons.

Coyhaique, capitale de la région est le point de départ des excursions vers la laguna San Rafael.

Le Lac General Carrera, point incontournable de la route australe, nous montre sa nature exubérante, contrastée par des zones de bosque muerto (forêt morte dû à un immense incendie qui ravagea la région il y a trente ans). Le lac, partagé entre le Chili et l’Argentine, avec plus de 978,12 kilomètres carrés et 200 kilomètres de long est le plus grand lac du Chili et le deuxième en Amérique du Sud.

Depuis le début des années 90, le lac General Carrera a ouvert au tourisme sa principale ville : Chile Chico. Il est possible d’y pratiquer la pêche sportive. De plus, à marée basse, vous pourrez partir en kayak pour découvrir les cathédrales de marbre, un ensemble d’îlots rocheux de couleur marbre et ivoire créé par l’érosion de l’eau sur la falaise.

Pour finaliser ce voyage, vous pourrez emprunter une barcasse entre Cochrane ou Villa O´Higgins, point le plus austral de cette route. Il vous faudra alors passer en Argentine, remonter prendre un bateau ou un avion pour continuer votre voyage.

L'histoire de la route australe

La colonisation de la route australe

Pendant des siècles, la région de la Patagonie a été occupée par des peuples autochtones. Les Kaweskars, peuple nomade, vécurent le long des canaux de la côte, naviguant à bord de canoës jusqu’à l’océan Pacifique, et vivant de la richesse que leur offraient les fonds marins. Les Aonikenks, de leur côté, étaient des chasseurs-cueilleurs qui suivaient la migration des guanacos et ñandús autour du Lac General Carrera.

Avec la conquête du désert du General Argentin Roca en 1879, de nombreuses communautés s’enfuirent dans la région Tehuelche, cherchant refuge. C’est aussi à partir de cette époque, plus exactement au début du XXe siècle, qu’un nombre important de ces cultures commencèrent à disparaître.

Route australe, entre Argentine et Chili

Les conflits frontaliers entre l’Argentine et le Chili, et les accords passés entre 1899 et 1901, ont poussé le gouvernement chilien à créer des concessions, ouvrant ainsi la région à la colonisation. Les colons blancs commencèrent à s’installer dans la zone ainsi que les puissantes sociétés d’élevage de bétail, de sylviculture et d’agriculture Patagonne, telle que la Sociedad Nacional de Ganadería y Colonización. Ils y créèrent de grands ranchs qui se développèrent de la région d’Aysén jusqu’à la région de Magallanes du Chili.

Ces sociétés d’élevage sont très étroitement liées à la destruction de l’environnement et à la dégradation du paysage dans cette région. Elles ont contribué à augmenter l’exploitation forestière illégale, ainsi que le défrichement des forêts, qui dans de nombreux cas se faisait par le biais d’incendies non contrôlés, afin d’établir des pâturages sur des terrains souvent peu productifs.

Arrivée des européens en terres australes

Beaucoup d’Européens, en particulier les Allemands, s’installèrent sur ces terres vierges et commencèrent à former de petits villages. Les migrants de l’île de Chiloé ont également été des éléments-clé de la colonisation de la Patagonie du Nord. Peu de documents ont été archivés sur ces héros méconnus qui ont apporté les compétences et les connaissances nécessaires à la réussite de ces colonies. Les habitants avaient des liens étroits avec l’Argentine. Les chilotes importèrent les produits alimentaires de base, les chansons folkloriques, certaines spécialités culinaires et le jeu de cartes truco.

L’arrivée de la Carretera Austral à la fin des années 1970 et dans les années 1990 a marqué la fin de cette ère, et le début de l’intégration des villages nord de la Patagonie au Chili dans le courant dominant du pays.

Une route vers la Patagonie

Des années 50 à 70 plusieurs tentatives infructueuses ont été faites pour obtenir des routes vers la Patagonie. Il a fallu attendre l’arrivée d’Augusto Pinochet au pouvoir en 1976 pour voir le projet titanesque de la Carretera Austral se réaliser. Pour Pinochet, il était indispensable d’intégrer cette région au pays afin de résoudre les graves problèmes d’approvisionnement et de transit migratoire. Un second objectif d’ordre géopolitique visait à peupler stratégiquement les zones frontalières, imposant ainsi la souveraineté du Chili dans la région. Ces aménagements du territoire permettaient de renforcer son potentiel économique extraordinaire.

Cette route traverse l’une des zones géographiques les plus rudes du monde. L’isolement et les obstacles naturels tels que les forêts vierges, les fjords, les marécages, les rivières, les lacs, les falaises, les vallées, combinés avec le manque de ressources humaines et matérielles, ont augmenté considérablement le coût de l’infrastructure nécessaire.

 

Construction de la route australe

Environ 10.000 membres du Corps d’Armée du travail (Cuerpo Militar del Trabajo) ont dû faire face à ces rudes conditions, à la pioche et à la pelle, pour ouvrir le chemin de ce qui deviendrait plus tard les 1.150 kilomètres de la route Australe, et ses 229 kilomètres de routes transversales.

Après 20 ans de travail et plus de 200 millions d’euros d’investissement, le projet s’est achevé en Mars 1996 avec le dernier tronçon qui relie Puerto Montt à Puerto Yungay.

Un lien entre les provinces chiliennes et argentines

La Route Australe s’étend sur les provinces de Llanquihue, Chiloé et Palena, dans la Xème région et toute la XIème région, couvrant les provinces de Aysén,General Carrera, Capitán Prat et Coihayque, intégrant la route transversale du sud de Rio Grande à Villa O’Higgins, et couvrant une superficie totale de 175.000 kilomètres carrés.

En Avril 2011 s’ouvre la route Bimodal joignant Hornopirén et Caleta Gonzalo par deux voies maritimes et une terrestre. Ceci rend plus facile et plus rapide l’accès à la Carretera Austral ou la Route 7. En effet, les espaces de navigation sont constitués de canaux internes, plus courts, assurant une ouverture annuelle, grâce aux eaux calmes qui les composent. Les différences avec l’ancien système sont considérables : à l’époque, un ferry réalisait le trajet de Hornopirén à Caleta Gonzalo uniquement en été, avec trois départs par semaine si les conditions météorologiques le permettaient…

Le gouvernement ajoute 400 nouveaux kilomètres de chaussée, offrant la possibilité d’en finir avec la navigation et de traverser cette zone par voie terrestre en moins de temps.